Elle pouffe de rire, avec ce ton cristallin typique des filles de son âge : "Ça c'est sûr, je vois bien... Wow ! (elle écarquille ses yeux) T'as pris masse de bouffe ; t'es vraiment un dalleux !". Je lui explique en bref mon pari avec l'ami, qui consistait en un pronostique assez peu évident d'un match assez indéterminé qui avait eu lieu l'avant-veille. Elle me regarde un peu étonnée, puis rigole à nouveau. "T'as pas changé, toi !" dit-elle.

Elle remarque alors mon léger air d'incompréhension sur ma pâle figure. Elle semble avoir compris que, peut être, je n'ai pas réellement la connaissance de son identité.

"Tu avais à ce point bu que tu ne te souviens même pas de moi ? Et ben, continue-t-elle. J'aurais dû me douter qu'après la troisième bouteille de Smirnoff tu n'aurais plus vraiment les idées claires : mea culpa."

Ah. Ça y est. Les images me reviennent en tête : c'était quelque chose comme mardi dernier, en banlieue, dans ce 25 m², entassé tous les quatre... Tous les quatre ? Mais qui étaient les deux autres ? C'est qu'elle a l'air particulièrement jeune la minette, presque mineure carrément. Inquiet, je lui demande si on a fait quoi que ce soit de spécial. Elle rit à nouveau, plus longtemps cette fois, puis me dit :

"Si boire beaucoup c'est spécial, alors oui. Sinon, non. Mais on y était pas loin, avec quelques bouteilles de plus peut être."

Je ris, un peu gêné, comme pour tenter de détendre l'ambiance. Elle me propose alors :

"Tu vas pas manger tout seul quand même ; c'est triste et tu n'es pas à ce point un morfale, non ? Allez viens je t'accompagne, on va fêter ça (elle met dans mon panier une bouteille d'alcool). Quand même, après deux jours de jeûne, il y a plus marrant que déjeuner dans son coin !"